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Espaces vectoriels normés de dimension finie et équivalence des normes

Dans ce paragraphe on s'intéresse à un k-espace vectoriel E de dimension finie n.
Définition de la norme infini sur E Choisissons une base $(e_i)_{\scriptsize {i =1..n}}$ de E. Dans cette base, les vecteurs x de E ont des coordonnées $(x_1,...,x_n)$$x_i \in k$. On définit alors sur E la norme $\Vert \Vert$$_\infty$ par

\begin{displaymath}\displaystyle {\Vert x\Vert _\infty=\sup_{i=1}^n \vert x_i\vert}\end{displaymath}

où | | désigne l'application valeurs absolue si k=IRet l'application module si k=IC. On vérifie que l'on a bien défini une norme sur E. Cette norme dépend bien évidemment de la base choisie.
Proposition On fixe une base $(e_i)_{\scriptsize {i =1..n}}$ de E. On peut alors introduire la norme $\Vert \Vert$$_\infty$ sur E. Cette norme est naturellement définie sur k$^n$. On a alors la propriété suivante:
(E,$\Vert \Vert$$_\infty$) est homéomorphe à (k$^n$,$\Vert \Vert$$_\infty$). On a même un isomorphisme bicontinue (Cad continue et d'inverse continue) entre ces deux espaces.
Démonstration A tout élément x de E, on associe ses coordonnées dans la base $(e_i)_{\scriptsize {i =1..n}}$: $(x_1,...,x_n)$. Cela définit une application $\theta: E\longrightarrow k^n$. $\theta$ est bien évidemment k-linéaire de E dans k, ainsi que bijective (Unicité des coordonnées d'un vecteur de E dans une base de E). Montrons que $\theta$ est continue. Soient x et y dans E, $(x_1,...,x_n),  (y_1,...,y_n)$ leurs coordonnées respectives . On a, par définition de la norme infinie: $\Vert\theta(x)-\theta(y)\Vert$$_\infty$=$\Vert x-y\Vert$$_\infty$. Notre isomorphisme $\theta$ est donc 1-lipschitzien. Mais cette dernière égalité peut aussi s'écrire : $\Vert(x_1,...,x_n)-(y_1,...,y_n)\Vert$$_\infty$= $\Vert\theta^{-1}(x_1,...,x_n)-\theta^{-1}(y_1,...,y_n)\Vert$$_\infty$. Ce qui prouve que $\theta^{-1}$ est elle aussi 1-lipschitzienne et donc continue. On a ainsi bien construit un homéomorphisme entre (E,$\Vert \Vert$$_\infty$) et (k$^n$,$\Vert \Vert$$_\infty$).
Corollaire Ceci a pour conséquence, en particulier, que tout compact de l'un a pour image un compact de l'autre. C'est cette propriété qui va nous être utile dans ce qui suit.
Lemme La boule unité fermée de (k$^n$,$\Vert \Vert$$_\infty$) est un sous espace compact de k$^n$.
Démonstration Notons $B_{f}(0,1)$ la boule unitée fermée de (k$^n$,$\Vert \Vert$$_\infty$). On vérifie (voir le cours sur les espaces métriques produits) que $B_{f}(0,1)$=[-1,1]$^n$ (si k=IR, sinon k=ICet $B_{f}(0,1)$=D(0,1)$^{n}$ où D(0,1)= $\lbrace z\in {\rm I\!C }; \vert z\vert \leq 1 \rbrace$). Or ([-1,1],| |) est un espace compact ((D(0,1),| |) si k=ICest un espace compact). Mais, d'après le théorème de Tychonov, un produit fini d'espaces compacts est compact pour la topologie produit . Donc $B_{f}(0,1)$ est un sous espace compact de (k$^n$,$\Vert \Vert$$_\infty$).
Lemme La boule unité fermée de (E,$\Vert \Vert$$_\infty$) est un sous espace compact de E.
Démonstration Ce sous ensemble de E est l'image par l'application $\theta^{-1}$ définie dans la démonstration de la proposition précédente de la boule unité fermé de k$^n$. Mais cette dernière étant compacte et l'application $\theta$ étant un homéomorphisme, la boule unité fermée de (E,$\Vert \Vert$$_\infty$) est nécessairement compact.
Théorème (Equivalence des normes) Soient $\Vert \Vert$$_1$ et $\Vert \Vert$$_2$ deux normes sur E. Alors ces deux normes sont équivalentes.
Attention, le fait que E soit de dimension finie est ici primordiale.
Démonstration Nous allons en fait travailler avec une norme $\Vert \Vert$ de E et montrer qu'elle est équivalente à la norme $\Vert \Vert$$_\infty$ sur E, une base $(e_i)_{\scriptsize {i =1..n}}$ étant fixée sur E. Par transitivité de la relation d'équivalence entre les normes, on aura ainsi montré que toutes les normes sur E sont équivalentes.
Montrons tout d'abord que notre norme $\Vert \Vert$ est continue sur (E,$\Vert \Vert$$_\infty$). Pour cela, prenons x et y dans E. Notons $(x_i)_{\scriptsize {i =1..n}}$ et $(y_i)_{\scriptsize {i =1..n}}$ leurs coordonnées respectives dans la base $(e_i)_{\scriptsize {i =1..n}}$. On a: $\vert\Vert x\Vert-\Vert y\Vert\vert\leq \Vert x-y\Vert$ Mais

\begin{displaymath}\displaystyle{\Vert x-y\Vert=\Vert\sum_{i=1}^n (x_i-y_i)e_i\V...
..._i\Vert\leq \Vert x-y\Vert _\infty \sum_{i=1}^n\Vert e_i\Vert}.\end{displaymath}

Posons alors

\begin{displaymath}\beta= \displaystyle{\sum_{i=1}^n\Vert e_i\Vert}.\end{displaymath}

L'inégalité se ré-écrit $\vert\Vert x\Vert-\Vert y\Vert\vert\leq \beta \Vert x-y\Vert _\infty$, ce qui prouve que $\Vert \Vert$ est $\beta$-Lipschitzienne et donc continue sur (E,$\Vert \Vert$$_\infty$). Ceci prouve, par ailleurs, une des deux inégalités que l'on doit remplir pour vérifier que nos deux normes sont équivalentes.
Montrons maintenant la deuxième inégalité. Comme la boule unité fermée de (E,$\Vert \Vert$$_\infty$) est compact, il en est de même de l'ensemble $S_\infty=\lbrace X\in E; \Vert x\Vert _\infty=1\rbrace$. En effet, $\Vert \Vert$$_\infty$ est continue sur (E,$\Vert \Vert$$_\infty$) et le singleton $\lbrace 1 \rbrace$ est un fermé de IR, donc $\Vert \Vert$ $_\infty^{-1}(\lbrace 1 \rbrace)$=$S_\infty$ est un fermé de E, de plus inclus dans la boule unité de (E,$\Vert \Vert$$_\infty$). Un fermé dans un compact étant compact, on obtient la propriété voulue. Mais $\Vert \Vert$ est continue et à valeur réelle sur (E,$\Vert \Vert$$_\infty$). L'ensemble de ses valeurs sur $S_\infty$ est donc majorée par une constante $\alpha$. On peut écrire : $ \forall x\in S_\infty  \Vert x\Vert\geq \alpha$ ou encore, par définition de $S_\infty$,

\begin{displaymath}\forall x \in E   \Vert{x \over \Vert x\Vert _\infty}\Vert\geq \alpha.\end{displaymath}

Soit encore: $\forall x \in E    \alpha\Vert x\Vert _\infty\leq\Vert x\Vert.$ Ce qui nous fournit la seconde inégalité et prouve le théorème.
Corollaire On a vu dans le chapitre sur les espaces métriques complet que IR$^n$ était complet pour la métrique produit. Comme la complétude d'un espace métrique est un propriété conservé pour une norme équivalente, on peut affirmer que IR$^n$ est complet pour n'importe quelle norme.
Corollaire En particulier, (IC$^n$,$\Vert \Vert$) est complet quelque soit la norme $\Vert \Vert$ choisie. En effet, (IC,| |) est complet car par définition IC=IR$^2$ et l'application module corespond à la norme Euclidienne sur IC. Comme IR$^2$ est complet pour la norme Euclidienne, il en de de même de (IC,| |). On en déduit que IC$^n$ est complet pour la métrique produit et donc pour toute norme sur IC$^n$.

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